💰 Pourquoi les chiffres sont (aussi) une affaire de RH ?
#45 - Maîtriser les coûts pour mieux piloter les ressources humaines
Au programme de cette édition :
🗞 Le condensé de l’info RH en chiffres. Je vous aide à décrypter les chiffres qui font l’actualité afin de vous fournir des repères clairs pour votre pratique RH.
🎯 Comment les chiffres peuvent-ils (vraiment) vous servir dans vos décisions RH ? Je vous donne les clés pour vous réconcilier avec les indicateurs.
🔢 Pourquoi la maîtrise de la règle juridique est la base d’une bonne maîtrise des coûts RH ? Illustration avec des exemples concrets.
💡 Et si les chiffres devenaient votre meilleure arme pour convaincre en réunion ? Petit guide pour RH qui veulent peser (aussi) dans les décisions budgétaires.
⏱️ Temps de lecture : 13 minutes.
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Avant de démarrer, je vous partage une ressource qui pourrait vous intéresser. Elle est réalisée par Elevo, Sponsor de l’édition du jour :
Dans un marché des talents de plus en plus compétitif, la rémunération est devenue un levier stratégique incontournable pour attirer, fidéliser et engager vos équipes.
D'après une enquête de Deloitte, 44 % des salariés citent l'absence d'équité salariale comme l'une des principales raisons de leur départ d'une entreprise. Mais comment aborder ce défi ?
Dans ce guide pratique élaboré par Elevo, vous trouverez :
Les enjeux clés de la rémunération et leur impact sur les stratégies RH pour 2025,
Des outils concrets pour bâtir une politique salariale équitable et attractive,
Des bonnes pratiques pour piloter et faire évoluer vos stratégies, adaptées à toutes les tailles et complexités d’organisation.
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Bonjour à toutes et tous !
C’est un plaisir de vous retrouver pour cette nouvelle édition d’Un Coût d’Avance !
L’actualité économique et sociale est toujours aussi chargée et pourtant, dans notre quotidien de RH, ce ne sont pas toujours les grands discours politiques ou les prévisions macroéconomiques qui nous guident, mais des décisions bien plus concrètes : augmenter ou non un collaborateur, verser une prime, embaucher, compenser une absence…
Et derrière chacune de ces décisions, une question revient : quel sera le coût ?
Car qu’on le veuille ou non, les services RH sont aussi les garants d’un pilotage économique éclairé. Et cela suppose de se réconcilier avec les chiffres, tout en gardant un œil sur les leviers juridiques à notre disposition.
Dans cette édition, je vous propose de repartir de situations très concrètes – rémunération, absentéisme, turn-over – pour mieux comprendre comment le droit social peut devenir un allié stratégique… et pourquoi les chiffres peuvent renforcer la crédibilité et l’impact de vos décisions RH.
Je vous en parle plus en détail juste après l’info chiffres et RH.
🗞 L’info RH en chiffres
📈 +2,8% - C’est l’évolution du Salaire Mensuel de Base en 2024, selon les derniers chiffres publiés par la DARES. Rapportée à la hausse des prix à la consommation (+1,6 %), cela représente un gain de pouvoir d’achat d’environ +1,2 % sur l’année écoulée. Une dynamique qui pourrait être difficile à maintenir dans un contexte d’incertitudes économiques persistantes (tensions commerciales, contraintes budgétaires de l’État...).
📊 42 % - C’est la part d’entreprises qui n’ont pas prévu d’augmentations générales pour leurs salariés dans le cadre des NAO 2025, préférant recourir à des mesures périphériques (primes, avantages périphériques), selon une étude flash du Groupe Alpha. Elles n’étaient que 23 % dans ce cas en 2024 : un signe clair du durcissement budgétaire dans les négociations salariales.
🏠 67 % - C’est la part de cadres qui se disent mécontents à l’idée d’une réduction du télétravail, selon une étude réalisée par l’APEC. Et c’est aussi la proportion de cadres qui télétravaillent au moins un jour par semaine. L’étude souligne que 4 entreprises sur 5 prévoient de maintenir le nombre de jours de télétravail en 2025 au même niveau qu’en 2024. Ces chiffres confirment l’ancrage durable du télétravail… mais essentiellement chez les cadres : seuls 28 % des professions intermédiaires et 1 % des ouvriers y ont accès.
💼 68,8 % - C’est le taux d’emploi des 15-64 ans en 2024, selon l’Insee, un record depuis le début de la série en 1975. Dans le détail :
Le taux d’emploi des jeunes (15-24 ans) recule à 34,4 %
Celui des seniors (50-64 ans) progresse à 68,4 %
Les 25-49 ans restent stables à 82,7 %
💰 1,5 milliard d’euros - C’est le montant d’économies annuelles attendu par l’Unédic grâce à la nouvelle convention d’assurance chômage, qui entrera pleinement en vigueur au 1er avril 2025. L’organisme y consacre d’ailleurs l’essentiel de son rapport d’activité 2024, soulignant qu’il s’agit d’un "nouvel élan pour la démocratie sociale".
💰 Pourquoi les chiffres sont (aussi) un sujet RH?
Cela fait désormais 15 ans que j’évolue dans les fonctions juridiques et RH d’entreprises de toutes tailles. Avec le recul, je suis aujourd’hui frappé par l’opposition qui existe encore souvent entre les fonctions RH et financières. Et lorsque je parle d’opposition, le mot n’est pas vain : il semblerait que les considérations financières s’opposent par nature aux préoccupations humaines.
De manière caricaturale, on imagine un département RH sincèrement soucieux du bien-être des salariés… face à des fonctions financières perçues comme froides, insensibles, uniquement guidées par les chiffres et les économies.
Bien sûr, cette vision est erronée. Elle repose sans doute sur certaines expériences vécues, mais elle ne reflète en rien la réalité du fonctionnement d’une entreprise. En réalité, les enjeux financiers ne s’opposent pas aux enjeux humains : ils en sont la traduction.
Là où, à mon sens, le bât blesse, c’est que nombre de professionnels RH ne sont pas à l’aise avec les chiffres (et c’est un euphémisme dans certains cas). Pourtant, c’est l’un des sujets centraux de notre activité.
Pour vous en convaincre, quelques chiffres : En 2023, plus de 80 % des emplois français relevaient du secteur tertiaire, selon l’Insee. Or, dans ce secteur, le premier poste de dépenses est la masse salariale. Parfois, elle représente jusqu’à 80 % du total des charges d’une entreprise.
C’est donc loin d’être anecdotique. Et cette masse salariale est le fruit direct de l’action RH : choix de rémunération, embauches et départs, politique de formation, dialogue social, qualité de vie au travail…
Pourtant, nous avons tendance à évaluer ces coûts a posteriori, en consultant le compte de résultat ou les extractions paie. Et bien souvent, ces chiffres ne sont pas analysés finement, ce qui limite notre capacité à ajuster nos pratiques.
Il serait beaucoup plus efficace d’anticiper ces coûts au moment de la décision. Pour cela, deux piliers me semblent essentiels :
une bonne maîtrise de la législation sociale
une compréhension minimale du fonctionnement d’un tableur Excel (je vous assure, ce n’est pas si compliqué 😉)
Je le sais, associer droit social et chiffres ne va pas de soi. Les études en droit social ne sont pas connues pour leurs cours de maths appliquées. Et pourtant !
Qu’il s’agisse d’un bulletin de paie, du calcul d’une indemnité de licenciement, ou du contenu d’un accord collectif, tout repose sur les règles du Code du travail et du Code de la sécurité sociale.
Autrement dit, la réglementation sociale est une boîte à outils à disposition des RH. Car, contrairement à une idée reçue, le Code du travail n’est pas uniquement une compilation de règles contraignantes. Il propose aussi de nombreux dispositifs qui offrent de vraies marges de manœuvre aux entreprises.
Voyons ensemble quelques exemples pour illustrer concrètement le lien entre choix juridique et impact chiffré.
💵 La rémunération
C’est un aspect que j’évoque régulièrement — et pour cause, il est particulièrement important. Penser une politique de rémunération implique de réfléchir à de très nombreux aspects : équilibre interne, attractivité externe, équité, fidélisation, incitations à la performance… Mais au bout du compte, il est essentiel que cette politique se concrétise dans des dispositifs précis, dont il faut maîtriser le coût réel.
Chaque mécanisme de rémunération a son propre régime juridique — et donc un impact financier différent pour l’entreprise. Regardons, à titre d’exemple, les principaux dispositifs aujourd’hui disponibles (la liste n’est pas exhaustive) :
Parmi ces mécanismes, il faudra choisir ceux qui seront les plus adaptés à la structure, à la culture et aux objectifs de l’entreprise. Et ce, qu’il s’agisse d’un recrutement individuel, d’une revalorisation collective ou de la négociation d’un accord de partage de la valeur.
Mais alors, comment s’y prendre pour comparer concrètement ces dispositifs ?
Prenons l’exemple d’un ou d’une responsable RH qui souhaite comparer les effets de trois leviers d’augmentation : une hausse du salaire brut, une prime d’intéressement, et une prime de partage de la valeur (PPV).
Admettons un salaire brut mensuel moyen de 3 000 €, qui coûte environ 4 080 € à l’entreprise, dans le cas d’une TPE de moins de 10 salariés. Ce chiffre repose sur un taux moyen de 36 % de charges patronales. Bien entendu, ce taux peut varier en fonction du taux AT, du coût des garanties prévoyance et santé, etc. Mais gardons-le ici comme ordre de grandeur pour faciliter la comparaison.
Voici les trois hypothèses étudiées 👇
1️⃣ Première hypothèse : augmentation de 1 000 € brut du salaire de base
Coût employeur estimé : 1 360 €
L’augmentation est soumise aux charges sociales habituelles. Elle modifie durablement le brut mensuel et impacte également les droits du salarié (retraite, congés, etc.).
2️⃣ Deuxième hypothèse : prime d’intéressement de 1 000 €
Coût employeur :
1000 € dans une entreprise de moins de 250 salariés (exonération de cotisations et de forfait social)
1200 € pour une entreprise de 250 salariés ou plus, du fait du forfait social à 20%
3️⃣ Troisième hypothèse : prime de partage de la valeur (PPV) de 1 000 €
Quel sera mon coût si je décide de verser une prime de partage de la valeur de 1 000 € ?
Là aussi, cela dépendra de l’effectif de l’entreprise et du revenu du salarié. Ce coût pourra être de 1000 € pour une entreprise de moins de 250 salariés pour un salarié gagnant plus de 1,6 fois le SMIC tandis qu’il pourra avoisiner les 1 700 € dans une entreprise de 250 salariés ou plus pour un salarié gagnant le SMIC du fait d’un assujettissement à forfait social et à la perte d’exonérations patronales
Si vous souhaitez comprendre plus en détail le coût, je vous invite à consulter cet article dans lequel je traite de l’évolution du régime social de la prime de partage de la valeur.
Comme vous le voyez, chaque dispositif possède ses propres règles et conséquences financières. On pourrait multiplier les exemples avec d’autres outils : participation, abondement PEE, BSPCE, etc.
Ce qu’il faut retenir, c’est que le choix d’un levier de rémunération ne se fait pas à coût constant. Anticiper ces impacts permet de mieux négocier, mieux conseiller, mieux piloter.
Et surtout, cela montre à quel point une bonne maîtrise des règles juridiques et de leurs évolutions à court et moyen termes est indispensable pour orienter ses choix et les traduire en chiffres concrets.
Mais cette démarche ne se limite pas à la rémunération. Voyons maintenant comment elle s’applique à d’autres sujets structurants pour la fonction RH…
🏥 L’absentéisme : un coût sous-estimé mais évitable
Quand on parle de masse salariale, il est essentiel de distinguer les coûts liés à un fonctionnement normal, avec un absentéisme modéré, de ceux générés par une dégradation du climat social ou des conditions de travail.
Mais comment faire cette distinction ?
En matière d’absentéisme, on se concentre souvent sur le nombre de jours d’absence. C’est un bon point de départ, notamment pour se situer par rapport au marché. Et bien sûr, l’objectif reste d’avoir l’absentéisme le plus bas possible, car cela permet de réduire des coûts parfois très significatifs.
Mais alors, comment les évaluer concrètement ?
De manière assez simple, on peut commencer par calculer le coût du maintien de salaire à la charge de l’entreprise, ainsi que les cotisations patronales associées.
À titre d’exemple, j’ai ici calculé le coût d’un maintien de salaire de 100 % pour un cadre gagnant 3500 euros, absent durant 3 jours.
On se rend ainsi mieux compte de l’impact budgétaire, même pour de courtes absences.
Mais pour avoir une vision complète, il faut élargir le prisme et recenser l’ensemble des coûts liés à l’absentéisme, au-delà du seul maintien de salaire :
le coût du remplacement (CDD, intérim)
le coût des heures supplémentaires pour compenser l’absence
le coût de la perte de productivité
les frais liés à la formation ou à la gestion administrative du remplacement
Au final, vous obtenez un chiffrage bien plus précis de ce que vous coûte réellement l’absentéisme dans votre organisation. Et surtout, vous êtes en capacité de mesurer plus finement les bénéfices que vous pourriez tirer d’un plan d’amélioration des conditions de travail, ou d’une réduction ciblée de certaines causes d’absences.
🔄 Le recrutement et le turn-over : ce qu’on ne chiffre pas toujours… mais qu’on paie quand même
Mesurer un taux de turn-over, c’est un bon point de départ. Mais à lui seul, ce chiffre ne dit pas grand-chose si on ne le met pas en regard du coût réel d’un remplacement.
Car oui, remplacer un départ coûte de l’argent. Souvent beaucoup. Mais ce coût est rarement évalué dans sa globalité.
Alors, comment s’y prendre pour le mesurer ?
Cela dépend bien sûr de l’organisation de l’entreprise, mais il est tout à fait possible et utile d’évaluer ce coût de manière structurée. Je recommande systématiquement de prendre en compte les éléments suivants, même si certains peuvent être approximatifs :
Le coût de la masse salariale de la personne (ou de l’équipe) en charge du recrutement — quitte à faire une moyenne du temps passé par recrutement. À cela peut s’ajouter le coût d’un cabinet externe, si l’on fait appel à des prestataires.
Le coût du traitement administratif du dossier d’entrée et de sortie du salarié (on se rend souvent mieux compte de cette charge quand elle est externalisée).
Le coût de l’onboarding et de l’intégration : formation, accompagnement, encadrement... Autant de ressources mobilisées qu’il faut intégrer dans le calcul.
Le coût de la montée en compétences : c’est sans doute le plus difficile à estimer. Il s’agit ici d’évaluer les salaires versés avant que la personne soit totalement opérationnelle sur son poste.
Les coûts liés aux ruptures en période d’essai, qui s’ajoutent à la liste si le recrutement ne va pas à son terme.
La liste n’est sans doute pas exhaustive, mais elle permet déjà de mieux cerner les pertes invisibles liées à un turn-over trop élevé.
En mettant ces éléments en regard de vos indicateurs RH, vous serez mieux armé pour objectiver vos décisions, argumenter face à la direction et, surtout, renforcer la stratégie de fidélisation dans l’entreprise.
🎯 Pour conclure…
Ces exemples pourraient être étendus à la formation, au dialogue social…
Mais tous montrent une chose : maîtriser les coûts RH, c’est d’abord comprendre la règle, puis l’anticiper en chiffres.
Cette approche permet :
de prendre des décisions RH sur des bases objectives
de renforcer la crédibilité de la fonction RH auprès de la direction générale et financière
de mieux dialoguer avec les autres départements
Et si vous souhaitez continuer à monter en compétence sur ces sujets, vous pouvez compter sur les prochaines éditions d’Un Coût d’Avance !
À ce propos, je prends volontiers votre retour pour savoir quel type de format freemium pourrait vous apporter encore davantage de valeur en complément des éditions actuelles.
Pour ce faire, n’hésitez pas à répondre à ce petit sondage ou à m’adresser directement un mail ou un message Linkedin si vous souhaitez développer vos réponses.
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Et si vous pensez que le sujet peut intéresser d’autres personnes, n’hésitez pas à partager !
À bientôt pour de nouveaux articles liant chiffres & RH !
Vincent 👋
Bonjour,
Je vous ai connu via les réseaux sociaux et vos infographies (bravo pour celles ci).
Je viens de lire votre article "pourquoi les chiffres sont aussi importants en RH" et je tenais à vous dire que je partage totalement votre point de vue.
Je suis juriste de formation mais par chance j'ai débuté ma carrière en cabinet comptable et ai été formée à la paie, à la gestion de la masse salariale....
Aujourd'hui, après 15 ans dans un cabinet et qualité de responsable de service (paie et juridique) je me lance à mon compte dans le conseil et la formation des entreprises en ...en quoi d'ailleurs, si je dis en RH la plupart des clients ne vont pas voir le côté juridique et encore moins paie de ce conseil.
En droit social: peut être plus parlant, mais quand on dit droit on pense tout de suite aux procédures .....
Moi j'aime le droit, la paie, le gestion RH et je suis tellement d'accord avec vous: tout ceci va ensemble et sans la paie, les chiffres, on ne peut bien conseiller en RH.
Alors merci.
Aurélie REY
Les absences de courtes durées (moins de 3 jours) sont monnaies courantes. Et je visualise mal les axes sur lesquels nous pouvons intervenir pour les éviter. Avez-vous des pistes ?