💰📈 Payer mieux un salarié en dépensant moins
#8 - Comment bien évaluer les avantages d'un package de rémunération
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J’espère que vous avez toutes et tous passé une bonne semaine☀️! Je suis très heureux de vous retrouver aujourd’hui pour nous livrer à un exercice de comparaison entre deux “modes” de rémunération💰.
L’objectif est de vous montrer que le salaire brut, c’est bien, mais dans certaines limites.
Pourquoi? Car d’autres mécanismes de rémunération s’avèrent bien plus avantageux pour le salarié comme pour l’entreprise. Alors, à l’heure où les entreprises peinent à attirer les talents et où 18% des français indiquent vouloir quitter prochainement leur emploi1, il semble indispensable de savoir proposer (et comprendre) des packages de rémunération attractifs (sans causer la ruine des entreprises 😉).
Dans cet article, vous comprendrez pourquoi des salaires élevés coûtent chers aux entreprises françaises 🇫🇷 et pourquoi ce n’est pas une fatalité. Je vous expliquerai également pourquoi il est utile de ne pas raisonner systématiquement en salaire brut mais en pouvoir d’achat (c’est-à-dire en argent que vous touchez une fois les charges sociales et les impôts payés!).
Résumé de l’article
Toucher un salaire brut important est toujours appréciable. C’est la reconnaissance de la valeur des compétences, du parcours accompli, des défis relevés... Cependant, la hausse du salaire brut entraîne la hausse du taux d’impôt du salarié et la hausse du taux de charges patronales 📈.
Le ratio pouvoir d’achat perçu par le salarié / coût payé par l’entreprise ne cesse alors de se dégrader.
Il existe cependant des alternatives
Si vous voulez tout comprendre du sujet, c’est par ici ! 👇
Commençons par les présentations 👋
Je vous présente Alice👩💼 et Paul 👨💼. Ils sont tous deux cadres dans deux PME différentes. Leurs entreprises comptent moins de 250 salariés.
👉 Paul👨💼touche un salaire brut annuel 💰 de 51 000 euros pour 218 jours travaillés/an. Il n’utilise pas les transports en commun et vient travailler chaque jour au bureau!
👉 Alice👩💼perçoit un salaire brut annuel 💰 de 41 000 euros pour 218 jours travaillés/an. Elle se rend en vélo au travail trois jours par semaine et télé-travaille le reste du temps. Lors de son embauche, on lui a indiqué que l’entreprise versait de la participation et des primes en fin d’année.
Dans le détail, voici exactement ce qu’elle touchera en 2022, en complément de son salaire brut :
Une prime sur le partage de la valeur de 3 000 euros
Une prime de participation de 2 000 euros
Un abondement de l’employeur de 100% si la participation est versée sur le PEE (dans la limite de 2 000 euros
Des titres-restaurant avec une participation annuelle de l’entreprise de 1 290 euros
Une indemnité annuelle de télétravail de 200 euros
Sur le papier, si l’on s’arrête à la comparaison de la rémunération brute, Paul touche quasiment 20% de plus qu’Alice. C’est quasiment l’écart moyen de rémunération entre homme et femme aujourd’hui en France, hélas!
Mais, pour comparer ce qui est comparable, nous allons devoir analyser l’ensemble du package de rémunération d’Alice pour le comparer au salaire de Paul!
L’analyse du package de rémunération 💶
Pour pouvoir comprendre combien Paul et Alice vont toucher grâce au deux “systèmes” de rémunération comparée, nous allons raisonner en pouvoir d’achat en convertissant les montants bruts de leur rémunération en rémunération nette après charge et impôt!
Précision importante, ils sont tous les deux célibataires, cela facilitera le calcul de leur impôt😉.
Le pouvoir d’achat de Paul 💰👨💼
La rémunération de Paul est constituée exclusivement de son salaire brut.
Ainsi, l’ensemble de la rémunération de Paul sera soumise à charges sociales (à un taux d’environ 21%) et à impôt sur le revenu.
Plus le salaire brut sera important, plus l’impôt payé par Paul sur chaque euro de salaire sera important. Si vous souhaitez comprendre en détail le calcul de l’impôt sur le revenu, vous pouvez consulter 👉 cet article.
Regardons ce que cela donne dans les chiffres (je vous épargne les calculs pour cet article). Pour 51 000 euros bruts, Paul touchera :
une rémunération nette avant impôt de 40 100 euros / an
une rémunération nette d’impôt de 34 700 euros / an (son pouvoir d’achat)
Le pouvoir d’achat d’Alice 💰👩💼
La rémunération d’Alice va être plus longue à détailler.
Le salaire d’Alice
Commençons par convertir son salaire brut en pouvoir d’achat. Pour 41 000 euros bruts, Alice percevra :
une rémunération nette avant impôt de 32 000 euros / an
une rémunération nette d’impôt de 28 900 euros / an (son pouvoir d’achat)
Ce montant est bien inférieur au salaire de Paul, ce qui est normal à ce stade.
La prime de partage de la valeur
De quoi s’agit-il? Cette prime (PPV pour les intimes) est un dispositif incitant les entreprises à verser une somme annuelle en complément de leur salaire habituel. L’idée sous-jacente est de permettre de mieux redistribuer les bénéfices de l’entreprise entre actionnaires et salariés.
Instaurée en 2022, cette PPV dispose d’un régime social et fiscal très intéressant : aucune charge et aucun impôt lorsqu’elle est versé à des salariés gagnant moins de 3 fois le SMIC (soit près de 5037 € / mois à fin 2022).
L’entreprise peut verser jusqu’à 3 000 euros par an par bénéficiaire (6 000 euros si l’entreprise dispose d’un accord d’intéressement ou de participation non-obligatoire).
Dans le cas d’Alice, le montant brut de cette prime sera équivalent à son montant net d’impôt, soit 3 000 euros!
La prime de participation
De quoi s’agit-il? Pour faire simple, il s’agit du versement, aux salariés, d’une partie des bénéfices nets réalisés par l’entreprise (la formule légale de calcul est un peu barbare! Je vous l’expliquerai dans un prochain article).
Le montant de cette prime ne peut pas être connue à l’avance et dépend donc des résultats réalisés par l’entreprise chaque année.
Pour 2022, le montant de cette prime s’élève pour Alice à 2 000 euros bruts.
Mais combien cela vaut, traduit en pouvoir d’achat?
Des charges sociales sont systématiquement dues sur les primes de participation. Il s’agit de la CSG-CRDS au taux de 9,7%. Cependant, Alice ne sera pas obligée de payer d’impôt sur cette somme… si elle décide de “bloquer” cet argent.
Qu’est-ce que cela signifie? Bloquer cet argent, c’est en réalité le placer sur un plan d’épargne pour une durée minimum de 5 ans (dans le cas de plan d’épargne entreprise) ou jusqu’à sa retraite (dans le cas d’un plan d’épargne pour la retraite collectif)
L’argent n’est donc pas immédiatement disponible mais sert d’épargne à moyen ou long terme (et c’est une bonne chose!).
De plus, en étant placé sur le plan d’épargne entreprise, Alice pourra débloquer les sommes sans attendre le terme de 5 ans (et toujours sans payer d’impôt) si elle se marie ou se pacse, si elle achète sa résidence principale ou si elle quitte son entreprise.
🚨 Les cas de déblocage anticipé sont nombreux et propre à chaque support de placement. Pour connaître les différents cas de déblocage anticipé pour chaque type de support, vous pouvez consulter 👉ce lien.
Alice a d’autant plus intérêt à bloquer cet argent qu’elle bénéficiera d’un abondement de la part de son entreprise!
Une fois la CSG/CRDS déduite, elle touchera donc 1 806 euros nets d’impôt (bloqués pour 5 ans).
L’abondement des sommes versées sur le PEE
En cas de versement de la prime de participation sur le plan d’épargne d’entreprise (PEE), l’employeur d’Alice prévoit un abondement de 100 % des sommes versées (dans la limite de 2 000 euros.
De quoi s’agit-il? L’abondement est un mécanisme facultatif qui permet à l’employeur de verser “un supplément” lorsque le salarié décide de verser de l’argent sur des plan d’épargne d’entreprise (ou plan pour la retraite collective).
L’employeur peut prévoir des règles d’abondement différentes en fonction de la provenance des sommes : il peut s’agir d’une prime de participation, d’une prime d’intéressement, d’un versement volontaire du salarié.
L’abondement sera bloqué avec les sommes qu’il abonde et bénéficie du même régime fiscal et social.
Alice bénéficiera donc de 2 000 euros d’abondement (100% du montant issu de la prime de participation dans la limite de 2 000 euros) soit 1 806 euros nets d’impôts et de charges.
Les petits “à côtés” d’Alice
Télétravail, forfait de mobilité durable et titres-restaurant constituent également des avantages dont Alice bénéficie. L’ensemble de ces éléments sont intéressants car il ne subissent ni charges sociales, ni impôt (dans certaines limites tout de même 😉).
Les montants indiqués en brut seront identiques en net de charges et d’impôt.
Mais de quoi s’agit-il dans le détail.
👩💻 l’indemnité télétravail sert à rembourser les salariés des frais qu’ils ont à supporter du fait du travail à domicile (internet, électricité notamment). L’URSSAF et l’administration fiscale admette que l’on verse forfaitairement jusqu’à 2,50 euros par jour télé-travaillé sans payé d’impôt et de charges (et sans avoir à justifier du montant dépensé par le salarié)
🚲 le forfait de mobilité durable est un dispositif permettant aux entreprises de prendre en charge, au moins pour partie, les frais engagés par les salariés pour se rendre sur leur lieu de travail en utilisant des modes de transport “propres” (vélo, vélo électrique, véhicule électrique…) Ce forfait est exonéré d’impôt et de charges sociales dans la limite de 700 euros dans le cas de l’utilisation du vélo (il faut naturellement justifier de l’emploi de ce mode de transport et de la distance parcourue)
🍜 les titres-restaurants : sur ce point, il est simplement intéressant de noter que l’entreprise peut prendre 50% à 60% du montant du titre à sa charge. Le montant de la prise en charge de l’entreprise est exonérées de charges sociales et d’impôt dans la limite de 5,92 euros (montant pris en charge par l’entreprise d’Alice)
Ok! Résumons donc tout cela dans une petite infographie !
Conclusion : pour un montant brut quasi identique (50 190 euros pour Alice, 51 000 euros pour Paul), Alice gagnera 37 702 euros de “pouvoir d’achat” contre 34 700 euros pour Paul.
Cet écart de 3 000 euros représente plus d’un mois de salaire pour Paul.
Cependant, Alice ne disposera pas de l’ensemble de ces sommes immédiatement puisque 3 612 euros seront “bloqués” sur le compte épargne temps. Ainsi, elle disposera de 34 090 euros sur son compte bancaire en 2022 mais elle s’est déjà constitué une épargne qui pourra lui servir sur du moyen terme.
Dernier bémol : les primes de participation et de partage de la valeur ne sont pas des avantages contractuels et peuvent varier en fonction des résultats de l’entreprise. Il est donc très important de comparer ce qu’à réaliser l’entreprise par le passé pour estimer la “chance” de percevoir un montant précis de participation (sachant que le passé ne présage pas toujours de l’avenir…).
Ces mécanismes nécessitent, dans tous les cas, de la performance dans les entreprises et donc incite le collectif à travailler dans un même sens.
Si le package d’Alice s’avère plus intéressant que le “seul” salaire brut de Paul, c’est également moins coûteux pour son entreprise !
Très chers salaires💰
Pour certains parties politiques ou media, les salaires coûtent (trop) chers en France à cause, notamment, du poids des charges patronales qui s’ajoutent à ce que perçoit le salarié.
Pour vérifier ce constat, il serait intéressant de comparer ce qui est comparable ! Si les charges patronales sont importantes, c’est qu’elles financent également un haut niveau de protection sociale dans de nombreux domaines :
👨🦳 assurance retraite (légale et conventionnelle)
🚑 assurance maladie (sécurité sociale, mutuelle, prévoyance)
👨👩👧👦 allocations familiales
💶 assurance chômage
🚌 participation aux transports publics…
La liste est loin d’être exhaustive. Est-ce cependant aux entreprises de financer ces sujets? C’est en tout cas le résultat de notre riche histoire! Mais je m’égare…
Ce qui nous intéresse ici, c’est de comparer le coût supporté par l’entreprise d’Alice et celui supporté par l’entreprise de Paul.
Comparaison des coûts salariaux
Si Paul et Alice ont tous les deux un salaire identique, le taux de charge patronal n’est pas identique!
👉 Pour 41 000 euros de salaire brut, l’employeur d’Alice paiera 17 000 euros de charges patronales, soit un taux de 41,5%
👉 Pour 51 000 euros de salaire brut, l’employeur de Paul paiera 17 000 euros de charges 24 000 euros de charges, soit un taux de 47%
Pourquoi une telle différence?
Car le taux de charges patronales augmente proportionnellement aux salaires. Ainsi, plus un salaire est proche du SMIC, plus le taux de charges patronales est faible.
Parmi les mécanismes d’exonération, nous pouvons notamment citer :
les exonérations générales de cotisations sociales (anciennement nommées “Fillon”) qui s’appliquent sur les salaires compris entre 1 et 1,6 fois le SMIC
exonération partielle de cotisations maladie qui s’applique sur les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC
exonération partielle de cotisation “allocations familiales” qui s’appliquent sur les salaire inférieurs à 3,5 fois le SMIC
Pour mieux comprendre le mécanisme, j’ai illustré la relation entre hausse du salaire et hausse du taux de charges patronales dans le tableau ci-dessous :
Le coût d’un salaire pour une entreprise variera beaucoup en fonction du profil des salariés : certains secteurs d’activité bénéficieront de manière importante des exonérations (secteur de la propreté, de la sécurité…). A l’inverse, le coût du travail sera bien plus important dans les entreprises employant principalement des cadres (finance, nouvelles technologies…)
Quelques soient le niveau de salaire, il est possible de mettre en place des dispositifs venant compléter le salaire de base et dont le coût pour l’entreprise pourra s’avérer plus avantageux, notamment pour les salaires les plus élevés.
C’est le cas des dispositifs mis en place de l’entreprise d’Alice
Le coût des “compléments” au salaire de base
Sans entrer dans un trop grand niveau de détail, le but est ici de regarder quel coût l’entreprise va supporter pour chaque dispositif mis en place par l’entreprise d’Alice pour compléter le salaire de base.
Vous trouverez la synthèse dans cette infographie :
On apprécie là tout l’intérêt de ces dispositifs ! L’employeur d’Alice ne paiera que 800 euros de charges patronales en plus du coût brut des avantages octroyés. Une différence énorme par rapport au coût engendré par le versement d’un salaire brut!
🚨 Il est tout de même important de noter que ces éléments de rémunération ne permettent pas d’acquérir des droits supplémentaires pour le salarié en matière de retraite (sauf à alimenter un PERCO) et de chômage
Calcul final 🧮
Faisons les comptes :
👉 l’employeur de Paul aura dépenser 24 000 euros de charges patronales en plus du salaire de 51 000 euros soit un coût total de 75 000 euros. Paul n’aura touché, dans sa poche, une fois les charges payées “que” 34 700 euros
👉 l’employeur d’Alice aura quant à lui dépenser 17 800 euros de charges patronales en plus des éléments de rémunération brut dont Alice bénéficie (50 190 euros) soit un coût total d’environ 68 000 euros. Alice touchera 37 700 euros dans sa poche!
Conclusion : l’employeur de Paul dépensera 10% de plus que l’employeur d’Alice pour que son salarié touche 9% de moins !!!
Il ne s’agit là que d’un exemple. Retenez cependant deux choses :
il est toujours important de traduire un package de rémunération en net de charges et d’impôt
plus le salaire brut augmente, moins le montant restant dans votre poche sera important. Au-delà de 3000 euros brut mensuel, pour 100 euros d’augmentation, un célibataire touchera moins de 60 euros une fois l’impôt et les charges payés (contre environ 80 euros pour une rémunération au niveau du SMIC)
Côté entreprise, se pose la question de “l’efficacité” des dispositifs de rémunération sur le pouvoir d’achat des salariés. Un indice intéressant pour évaluer ce point est de calculer le ratio : pouvoir d’achat perçu par le salarié / coût dépensé par l’entreprise
👉 Pour l’entreprise de Paul, ce ratio est de 46 % (34 700 / 75 000)
👉 Pour l’entreprise d’Alice, le ratio est de 55 % (37 700 / 68 000)
Cela signifie que lorsque l’entreprise d’Alice verse 100 euros, 55 vont dans la poche d’Alice.
Grâce à cet article, vous avez désormais les clés pour améliorer votre propre ratio 😉.
J’espère que cet article vous a plu! Pour le compléter, je travaille actuellement sur l’élaboration d’un petit simulateur que les abonnés pourront retrouver prochainement dans le drive partagé avec les autres simulateurs.
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Vincent 👋